Ok, je vais essayer d’expliquer ça le plus clairement possible parce qu’il faut que je décrive la place qui a changé après les récentes rénovations.
Il y a quelques années, les éléments d’une des entrées du métro Guy Concordia étaient disposés en file de cette façon: Quelques tourniquets, la cabine-guichet de l’employé, un tourniquet, un mur. C’est ce tourniquet unique, placé entre la cabine et le mur dont il est question.
Donc, j’entre dans la station, descends les escaliers et je m’apprête à faire un U-turn en longeant le mur pour arriver aux guichets. Je connaissais bien la place, alors au lieu de regarder devant moi, mon attention est sur mon portefeuille d’où je tire une liasse de petits tickets. J’en sépare un de la liasse au moment ou j’arrive devant le tourniquet situé entre le mur et le guichet. Là encore, je ne regarde pas devant moi, mes yeux sont fixés sur la fente du tourniquet où j’enfile le billet. Le tourniquet fait KLONK, montrant qu’il a accepté mon billet. Je traverse donc et… Je me retrouve devant une barricade en bois peint en bleu.
Eh oui, il était interdit aux usagers de sortir par ce tourniquet. Cependant il n’y avait aucune barrière de l’autre côté pour empêcher les gens d’y entrer. Rien d’autre à faire que d’enjamber la barrière de bois alors. Je le fais.
Je n’ai le temps que de faire 5 pas que l’employé sort de sa cabine et me pogne par l’épaule.
LUI: HEILLE!!! Tu vas payer ton passage.
MOI: Je l’ai déjà payé.
LUI: Niaise-moé donc. La barrière marche pas.
MOI: À marche puisque j’ai mis mon ticket pis qu’à l’a pris.
LUI: TU L’AS DANS’ MAIN TON TICKET!!
MOI: Ah, ben, justement! Tu penses-tu que j’aurais sorti ma liasse de mon portefeuille si j’planifiais de pas payer?
LUI: Donne-moé ça!
MOI: Rouvre ta machine, tu va ben voir que mon ticket y’é dedans.
LUI: Ton nom y’é pas écrit dessus.
MOI: Non mais son numéro suit ou précède ceux que j’ai dins mains. C’t’une preuve ça!
LUI: M’as appeler la sécurité.
MOI: Parfait, ils vont pouvoir ouvrir la machine, trouver mon ticket pis prouver que j’ai payé.
LUI: T’as pas l’droit de passer là, y’a une barrière.
MOI: Premièrement j’l’ai pas vu parce que je regardais la slot du tourniquet quand j’mettais mon billet. Pis si on n’a pas l’droit d’entrer par là, pourquoi y’a pas de barrière de l’autre bord?
LUI: Tabarnak, m’as appeler la police!
MOI: Parfait, comme ça ils vont vous forcer à ouvrir la machine pis voir que mon billet est bien dedans.
Le gars se pogne la tête à deux mains, hurle RAAAAAAAAAAHHH!!!, tourne les talons, frustré au max et retourne s’enfermer dans sa cabine.
D’un côté j’peux le comprendre. Il a sûrement dû se faire niaiser plus d’une fois par du monde sautant les barrières et qui descendaient ensuite les escaliers en courant, et il ne peut quand même pas quitter son poste pour les poursuivre jusqu’aux quais. Pour une fois qu’il croyait avoir la chance de pogner un fraudeur, il était dans l’erreur.
Ce genre de chose ne peut plus arriver parce que depuis qu’ils ont enlevé les vieux tourniquets pour les remplacer par les versions Opus, ils en ont profité pour tasser la cabine directement sur le mur. N’empêche que y’avait vraiment l’air en STM SPM, du début à la fin, et son hurlement de rage m’a vraiment fait penser pendant une seconde qu’il allait me frapper. Bah, ça m’aurait juste permis de poursuivre la STM en dommages et intérêts.
Et vous savez pourquoi j’étais prêt à me battre jusqu’au bout, peu importe les conséquences? Parce que j’étais accusé à tort. Parce que je savais qu’au bout du compte, j’allais gagner. Parce que la vérité était de MON côté.
J’assume toutes mes gaffes et je reconnais toujours mes erreurs, à la personne concernée si c’est personnel, ou publiquement si l’erreur a été publique pour commencer. Par contre, j’en exige autant de tout mon entourage, ce qui fait hélas de moi la personne la plus gossante qu’ils ont jamais connu.
Je suppose que ça vient de mon enfance où j’étais souvent accusé de choses dont je n’ai jamais ni fait, ni même pensé à faire. Me faire ordonner de me taire par mes parents et d’endurer cette situation non-méritée pour ne pas faire durer le conflit était l’une des situations les plus frustrantes de ma vie. Voilà pourquoi, depuis que j’ai cessé d’être sous leur emprise, toute personne qui m’accuse à tort de quoi que ce soit se voit aussitôt confrontée par ma détermination à lui faire ou bien prouver son point ou bien devoir admettre qu’il/elle disait n’importe quoi.
Et pourtant, une fois, de mon plein gré, j’ai déjà reconnu un tort que je n’avais pas, justement dans le but de ne pas faire de la chicane inutile. C’était en 1990, alors que j’habitais chez la mère de ma blonde de l’époque. Travailler de nuit 5 jours semaine faisait que je trouvais rarement le sommeil avant 4am lors de mes jours de congé.
Une de ces nuits d’insomnie, pour ne pas réveiller ma blonde, je suis descendu à la cuisine pour lire. Au bout d’une dizaine de minutes, j’entends un BANG! provenant d’en face de moi. Je relève la tête. C’était la bibliothèque-étagère Ikea cheap de ma belle mère. Elle en avait stuffée toutes les tablettes à full-capacité de gros livres lourds. Et c’est à ce moment-là que les 4 pins en plastique retenant la tablette du haut ont cédé. En tombant sur la 2e tablette, le surplus de poids en fait péter les pins également, ce qui fait que les tablettes 1 et 2 tombent sur la 3e, lui pétant les pins également, et ainsi de suite dans une belle série de BANG! BANG! BANG! BANG! BANG!
Constatant le dégât, j’ai réalisé un truc… Mettez-vous à la place de la belle-mère: Sa bibliothèque qui pète, comme ça, au beau milieu de la nuit, sans aucune raison, pendant que son gendre, la seule personne encore réveillée à cette heure-là, se trouve justement dans cette pièce… J’aurais eu ben de la difficulté à être crédible en prétendant que je n’y étais pour rien.
Mon choix se résumait donc à deux options. Ou bien je dis la vérité en niant, et je perd ma crédibilité auprès de la femme qui me loge gratis, créant des tensions mère/fille, belle-mère/beau-fils, chum/blonde. Ou bien je mens en faisant accroire que c’était moi qui l’avait pété en essayant de ranger un livre de plus sur la tablette d’au-dessus, et on me pardonne vu la fragilité des pins et du fait que les étagères étaient déjà surchargées.
J’ai été pour la 2e option. Comme ça tout était clair, logique, satisfaisant, l’incident a été balayé comme étant un simple accident non-responsabilisant, et la belle-mère en fut quitte pour se procurer des pins en métal pour quelques sous.
Même si, aujourd’hui, je continue encore et toujours de me battre sans relâche pour clairer mon nom lorsque je suis accusé à tort, j’ai appris une leçon importante cette nuit-là il y a 20 ans. Il y a des moments dans la vie où il faut savoir prévoir les conséquences de la vérité, et peser le pour et le contre avant de voir si ça vaut vraiment la peine de se battre pour. Dans ce cas-ci, les circonstances faisaient que j’aurais eu zéro crédibilité en le niant, faisant de moi une personne louche de qui se méfier dans l’avenir. De l’autre côté, en prenant le blâme, j’avais juste droit à un « C’pas d’ta faute, c’est des choses qui arrivent », qui non seulement réglait automatiquement le conflit, ma réputation s’en trouvait même honorée.
C’est facile de dire La vérité c’est la vérité pis faut toujours la dire parce que faut en assumer les conséquences pis c’est ça qui est ça, pis point final , parce que appliquer aveuglément cette règle en toutes circonstances ne demande aucun effort de réflexion. Mais dans la réalité, même en admettant que le mensonge a des conséquences plus néfastes que la vérité dans 99% des cas, il reste quand même 1% où c’est le contraire.
Le gros défi là-dedans, c’est d’avoir l’intelligence de savoir faire la différence.
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