Être accro à l’idée de plaire

Je vais vous faire une confidence quelque peu embarrassante.  Vers 2002-2003, j’ai écrit un livre que n’ai jamais envoyé chez un éditeur, faute d’en trouver un dont la ligne éditoriale aurait correspondu avec le sujet.  De ce manuscrit de 229 pages, en voici la première:

Avec le temps, beaucoup d’aspects de ce que j’y ai écrit ont changé et ont cessé d’être valable. (Incluant mes coordonnées.)  Au fil des années, afin de ne pas tout perdre, il m’est arrivé de modifier et recycler quelques articles contenus dans ce projet de livre.  Environs le ¾ du manuscrit fut transformé pour devenir ces billets de blog:

La difficulté de dire « Non merci! » (Titre Original dans le Livre: Pourquoi nous mentent-elles? Les vraies raisons.)
Ce que les filles disent -VS- ce que ça veut dire.  (T.O.L: Décoder le langage féminin)
Les mensonges de la rupture.  (T.O.L: Décoder le langage féminin… Lors de la rupture.)
Échanger une prison contre une autre.
Salomé: Portrait d’une sociopathe.  (T.O.L: Salomé, celle qui obtient tout ce qu’elle veut.)
Les gaffes du premier rendez-vous.  (T.O.L: Les erreurs à ne pas faire.)
L’impuissance de voir une amie délibérément abusée. (T.O.L: Plus je lui ouvre les yeux sur le comportement abusif de son chum et plus elle s’éloigne de moi.  Pourquoi?)
Comment le fait d’être un bon gars a ruiné ma vie sociale, amoureuse et sexuelle, (1ère partie) (T.O.L: Daniella, ou: As a friend!)
Comment le fait d’être un bon gars a ruiné ma vie sociale, amoureuse et sexuelle, (3e partie) (T.O.L: Océane. Comment peut-on être encore aussi naïf à 28 ans?)
TARD ne vaut pas toujours mieux que JAMAIS.
L’analyse malvenue.  (T.O.L: Toi, t’es le genre de fille qui…)
Déclaration d’amour? Grosse erreur.  (T.O.L: Condamné par sa propre bouche.)
La malédiction du bon gars gentil et sauveteur. (T.O.L: l’ingratitude de la fille en détresse.)
Le pire des gars qui soit: Le Bon Gars
.  (T.O.L: Être un gars correct, ou seulement être un gars qui ne fait rien de pas correct.) ‘
Autopsie du Loser.  (T.O.L: Autopsie du Loser.  Êtes-vous votre propre pire ennemi?)
Le Chum idéal? Vraiment?  (T.O.L: Le gars idéal? Y’en a qui s’en font accroire pis pas à peu près!)
L’ÉCHELLE DE KEV, pour mesurer l’appétit sexuel de votre copine.
Misogyne? Moi?  (T.O.L: En guise de conclusion.)

Originalement, le message contenu dans ces textes disait « Dans telles situations, les filles agissent comme ça, et puis voilà, faut pas chercher à comprendre, c’est comme ça et pas autrement, faut l’accepter où se faire rejeter. » C’est qu’à l’époque, bien que j’étais déjà observateur, je n’avais pas encore acquis un haut niveau de sagesse.  Bref, c’était peut-être un pas dans la bonne direction, il reste que ce n’était qu’un pas.  Et un seul pas, ça ne va pas loin. Aussi, les modifications que j’ai apporté à ces textes avant de les reprendre sur ce blog sont surtout au niveau de la compréhension.  C’est à dire que maintenant j’explique le comment et le pourquoi de tels comportement au lieu de simplement les dénoncer.  J’ai aussi constaté avec les années que bon nombre de ces comportements sont unisexes.

Pour le billet d’aujourd’hui, j’expérimente une approche différente: Je reprend un autre texte de ce manuscrit en le laissant tel quel.  Et à la fin de celui-ci, j’apporterai corrections et compléments requis.   C’est parti:

Accros à l’idée de plaire
Cesser de vouloir une fille, c’est l’insulter? WTF?

Dans le chapitre Pourquoi nous mentent-elles? Les vraies raisonsj’ai parlé de l’incapacité de certaines filles de pouvoir dire à un gars de façon directe et précise qu’il ne l’intéresse pas au-delà de la simple amitié.  Or, j’ai appris à mes dépens que si c’est une bonne chose de réussir à décrocher d’une fille qui ne veut rien savoir de nous, ce n’est vraiment pas une bonne idée de le lui faire savoir.

En vingt ans de fréquentations féminines diverses, il m’est arrivé à au moins quatre reprises de vivre la situation suivante : Je suis attiré émotivement ou sexuellement par une fille, et je lui fais savoir.  Me demandant de patienter car elle ne peut accéder à ma demande pour l’instant, elle me fait staller durant une période allant de quelques semaines à quelques mois, soit parce qu’elle n’est pas prête à ça pour le moment, ou bien parce qu’elle a un chum.  J’ai beau être patient, il vient un moment où un gars se rend compte qu’il attend en vain. Par exemple, quand tu lui as déclaré ta flamme pendant qu’elle est célibataire, qu’elle te demande de patienter, puis qu’ensuite elle commence à sortir avec un autre gars tout en sachant que toi tu trippes sur elle, c’est généralement un bon signe comme quoi tu perds ton temps.  Dans ce temps là, puisque je vois bien que la fille n’est pas intéressée, je réalise que ça ne sert à rien d’insister puisque ça me fait attendre quelque chose qui n’arrivera jamais, tandis qu’elle a à subir mon désir non sollicité.   Quant à son chum, c’est jamais l’fun de savoir qu’on a un rival, qu’il ait des chances ou non.

Aussi, pour nous rendre service à tous, je me fais une raison et j’oublie ça.  Afin de la rassurer,  je lui fais savoir qu’elle peut enfin me voir sans avoir peur que je la viole, car mon intérêt pour elle a complètement disparu, à part la simple amitié que l’on a déjà.

La réaction de ces filles face à mes paroles qui se voulaient sincèrement rassurantes ?  Elles ont frustré, m’ont insulté, calomnié, m’ont évité, ont inventé plein d’écoeuranteries à mon sujet pour me descendre aux yeux des autres, et j’en passe et des pires.

 What the fuck ?

 Le plus frustrant, c’est que non seulement je prends la peine d’être assez compréhensif pour décrocher d’elles, j’accepte le fait qu’il ne se passera rien entre nous et je me retire dans le calme, l’harmonie et la dignité, tout en voulant continuer la relation amicale, plutôt que de frustrer après et de les traiter de toutes sortes de noms. Logiquement, si elle n’a pas envie de moi au-delà de l’amitié, la nouvelle comme quoi elle n’a plus rien à craindre de mes envies non-partagées ne peut qu’être accueillie positivement, non ?  Décrocher et te le faire savoir, n’est-ce pas la réaction idéale que peut avoir quelqu’un qui ne t’intéresse pas ?  Alors pourquoi une telle réaction ? Pourquoi ces filles m’ont-elle traité comme si je leur avait fait le pire des affronts alors que tout ce que j’ai fait c’est de les libérer d’un poids inutile ?

Quelle fut mon erreur ?  Mon erreur fut de réagir comme un gars, donc en utilisant la logique pour contrôler mes sentiments.  Or, au sujet des sentiments, rares sont les femmes qui font appel à la logique.  Ce n’est pas parce qu’une situation est meilleure pour tout le monde que ça signifie que cette solution va automatiquement lui plaire.

Les valeurs que véhiculent la société font que la femme ressent le besoin de plaire et de séduire afin de se sentir valorisée.  C’est sûr que de nos jours, une femme peut se trouver valorisée autrement, que ce soit dans sa carrière ou dans son rôle de membre actif de la société, de par son intellect, ou même comme mère modèle.  Hélas, pour celle qui n’a pas l’étoffe d’une femme de tête, de carrière ou de famille, son potentiel séducteur est pas mal tout ce qui lui reste pour se valoriser.  Je pense, par exemple, aux grosses dans les sites de rencontres, qui ne font rien d’autre que de passer leurs journées et leurs soirées devant leur webcam, en déshabillé transparent, à jouer la carte de la fille facile en offrant du sexe à tous les hommes, même ceux qui ne lui plaisent pas, juste pour avoir leur attention et leur affection.  Dans de telles conditions, lui faire savoir qu’elle a baissé sur notre échelle de désir, ça équivaut à lui dire qu’elle ne vaut pas grand chose.  Et ça, c’est insultant.

La dernière avec qui ça m’est arrivé était une belle jeune fille de 26 ans, le genre a avoir l’embarras du choix et à vouloir le garder.  Voyant que je n’avais aucune chance, je l’ai rassurée que j’avais décroché.  Elle me faisait la belle façon en face, tout en écrivant dans son journal personnel online que j’étais rien qu’un hypocrite plein d’marde qui lui joue dans l’dos. Confrontée aux écoeuranteries qu’elle écrivait en public à mon sujet, elle m’a donné comme explication que, puisque j’avais perdu tout désir charnel pour elle, il était donc évident que je ne voulais plus rien savoir d’elle, même en ami. (Et on dira après ça que seules les femmes sont la cible de préjugés sexistes.)  Et puisque dans son raisonnement, lorsque l’on n’est pas ami on est ennemi, alors elle ne se gênait pas de me traiter comme tel, du moins dans son journal.

Un conseil en passant, pour les auteurs de blogs : Un journal personnel ne peut pas être à la fois ONLINE et SECRET.  C’était la 4e fois qu’elle perdait des amis parce qu’ils avaient découvert de cette façon ce qu’elle pensait d’eux. Y’en a qui n’apprennent jamais.

Comment ne pas faire cette erreur ?  Sans pour autant faire exprès de continuer d’entretenir faussement chez elle l’idée que tu trippes dessus, la meilleure chose à faire est de fermer ta yeule.  Mieux vaut que ton manque de désir pour elle reste nébuleux, plutôt que d’avoir sa frustration pour toi qui soit claire.

J’en vois déjà qui vont s’objecter du fait que quand une fille repousse un gars, il faut l’accepter, mais quand c’est un gars qui repousse une fille, elle ne l’accepte pas.

Est-ce que c’est injuste?  Oui!
Est-ce que c’est immature comme réaction et comme comportement féminin?  Oui!
Qu’est-ce qu’on peut y faire?  Rien!

 Celui qui se donnerait comme mission d’éduquer les filles sur ce point et de les forcer à faire face à la réalité de l’injustice de ce comportement doit s’attendre à passer une longue vie solitaire, s’il croit vraiment pouvoir à lui tout seul changer la mentalité de 50% de la population.  Alors c’est toi qui as le choix :  Si tu veux jouer, il va falloir accepter leurs règles, sinon tu vas passer le reste de ta vie à devoir t’amuser tout seul dans ton coin.

Attendrissant, non, ce petit côté frustré, misogyne et passif-agressif que l’on peut déceler dans ce texte? Il ne faut pas m’en vouloir.  D’abord, parce qu’en 2002, j’étais encore ignorant.  Et ensuite, non seulement j’y démontrais que je m’étais résigné à jouer selon les règles injustes établies par les femmes, j’invitais les autres hommes à en faire autant. On ne peut donc pas nier que j’avais l’esprit ouvert.  Ignorant, d’accord, mais tout de même ouvert.  De toutes façons, au nombre de fois où on m’a cité Oscar Wilde avec son « Les femmes sont faites pour être aimées, pas pour être comprises. », je m’étais également résigné au fait que personne ne nous demandait de comprendre pourquoi une fille tenait à avoir l’affection de gars qui ne l’intéressaient pas.  Je devais juste l’accepter.

Et nous voici au moment où je vous fais ma confidence embarrassante. Non, ce n’est pas le fait que j’ai un jour écrit un tel livre.  C’est le fait que six ans après avoir écrit l’article reproduit ci-haut, j’ai moi-même adopté l’attitude que j’y dénonce.

Janvier 2008, je m’inscris à Défi Diète.  J’ai déjà raconté cette histoire alors on n’y reviendra pas. Il suffit juste de voir les résultats…
… et de savoir que pour la première fois de ma vie, je plaisais avec mon physique. 

Ça a débuté de façon anodine, sur le blog de Défi Diète que les participants étaient encouragés à écrire sur (le maintenant défunt) Espace Canoë.  Lorsque j’y ai posté mes photos post-défi, plein de gens que je ne connaissais pas m’ont écrit des commentaires positifs.  Les gars étaient impressionnés.  Les filles disaient me trouver beau.  Et gars comme filles m’exprimaient ne pas croire que j’allais avoir 40 ans au milieu de cet été-là.

Peut-être par manque d’habitude ou peut-être pour cause d’Ego déjà naturellement porté à trop se gonfler, ces flatteries me sont vite montées à la tête.  Plus je recevais de compliments, plus ça me faisait du bien et plus je voulais en avoir.  C’était une drogue.  Voilà pourquoi je n’ai de ma vie jamais autant fait preuve de narcissisme que durant les mois de juin, juillet et aout 2008.

À la recherche d’autres flatteries, je suis allé dans les quelques forums que je fréquentais et j’y ai posté un résumé de mon parcours dans les section sports/santé/bien-être, avec photos à l’appui, bien entendu.  Ça n’a pas trainé: Témoignage d’étonnement, mots d’admiration, et surtout des compliments de la part de filles qui ne m’avaient jusque-là jamais donné que leur indifférence.  Je m’inscris à d’autres forums et je retourne sur ceux que j’avais abandonné depuis des années, incluant un créé par et pour des femmes ayant de l’embonpoint mais où les messieurs étaient les bienvenus.  J’ai poursuivi ma lancée en allant m’afficher sur de mes blogs inactifs sur MySpace.  J’ai même poussé la chose jusqu’à aller m’inscrire sur plusieurs sites de rencontres.  Sans pour autant dire sur ma fiche que j’étais en couple, je prenais néanmoins la peine d’y écrire que je n’étais là que pour amitié seulement.  C’est que je me doutais bien que ça allait m’attirer beaucoup plus de compliments et d’attention que si je disais que j’avais déjà une blonde. 

De celles qui venaient à moi d’elles-même, je buvais les compliments et l’attention, toujours en y répondant d’un air faussement naïf, les poussant à continuer, à me multiplier les témoignages d’affection, me laissant désirer.  Beaucoup m’offraient leur adresse MSN (Version préhistorique de Skype, mais dans le style de la messagerie Facebook.) afin de jaser en privé.  J’en acceptais certaines, j’en refusais d’autres.  Je jouais le jeu du naïf qui ne se rend pas compte qu’il se fait draguer.  Et j’étirais la sauce autant que possible, jusqu’au moment où la fille, désespérée de me voir réagir, finissait par me dire clairement que je lui plais et/ou qu’elle me désire sexuellement.  C’est là que, à mon grand regret, j’ai eu à mettre les choses au clair avec elles et que j’ai eu à les repousser.  Et si je dis que c’était à mon grand regret, c’est parce que ça signifiait que ça allait diminuer l’attention et les compliments que j’allais recevoir.

Hélas, se faire repousser, peu de gens le prennent bien.  Surtout quand l’autre n’a jamais été clair et t’a laissé rêver à son sujet.  J’ai eu droit à tout: De la déprime à la colère noire, des crises de larmes aux crises d’hystéries, des lettres d’amour aux mails d’insultes, de celles qui m’ont instantanément banni et oublié à celles qui sont restés accrochés sur mon cas en me stalkant partout jusqu’à un an et demi plus tard.  Ayant eu la stupidité d’avoir joué ce jeu avec une des programmeuses/modératrices d’Espace Canoë, elle a commencé par m’en interdire l’accès en changeant le mot de passe de mon blog, avant de le détruire pour de bon la semaine suivante. Du côté des forums, il n’était pas rare que des gens soient membres de plusieurs de ceux-ci, alors partout où j’allais, il y en avait au moins un qui me connaissait, ne serait-ce que de (mauvaise) réputation, et en parlait aux autres.  Rendu en septembre 2008, tout le monde s’était passé le mot et voyait clair dans mon jeu.  Les seules personnes à me manifester encore de l’intérêt, c’était pour me démolir.  Les autres m’ignoraient avec mépris. 

Pendant 90 jours, je me suis comporté exactement comme ces femmes que je dénonçais six ans plus tôt dans mon texte, en désirant avoir l’amour et l’attention de gens à qui je n’aurais jamais rendu la pareille.  Après ces trois mois de rêve à me faire idolâtrer, j’étais redevenu un moins que rien.  Je ne suis pas un haineux de nature, alors je ne me suis pas mis à haïr ces femmes et ces filles pour avoir commis le crime de cesser de m’aimer.   N’empêche que ça m’a rendu très déprimé.

C’est là que j’ai appris qu’il est facile de juger quelqu’un pour son comportement égoïste et illogique.  Mais quand on se met à la place de cette personne, même si ce comportement reste égoïste et illogique, on peut quand même mieux comprendre ce qui la pousse à agir ainsi.  Peut-être pas l’accepter, mais au moins le comprendre.

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