Je sais bien que généralement, je préfère mettre en ligne des photos de moi où je parais le mieux. Sauf quand je veux faire une comparaison avant-après à la « Woah p’tain, regardez comment j’me suis amélioré en passant de Quasimodo à Casanova. » Mais bon, faut dire ce qu’il en est, je suis surtout regardable lorsque je fais des efforts pour améliorer mon apparence et qu’un appareil photo me prend dans un bon angle. Parce que sinon, dans la vie de tous les jours, au naturel, et surtout au travail, je n’ai pas de quoi faire mouiller une éponge coincée dans l’épave du Titanic.
Et pourtant, si vous saviez le nombre de fois où j’ai pu être la cible de harcèlement sexuel au travail, de 1990 à aujourd’hui. On entend souvent parler de ce phénomène quand il s’agit d’hommes qui harcèlent les femmes, mais jamais l’inverse. Pourtant, ça existe. Ça fait vingt-cinq ans que je le subis.
Ayant été élevé dans un environnement presque exclusivement féminin, j’ai passé toute ma jeunesse à entendre filles et femmes parler contre les travers des hommes. De leur comportement macho, de leur violence, et surtout de leur désir sexuel qui les pousse à commettre tous les écarts. Je les ai entendu se plaindre comme quoi ils ont les pires comportements, les pires attitudes avec les femmes, surtout en milieu de travail. J’ai donc été éduqué de façon à ne pas agir ainsi. Voilà pourquoi, à chaque fois que j’ai un boulot, j’agis de façon professionnelle avec mes collègues féminines, n’étant jamais rien d’autre qu’amical, agissant d’égal à égal, gardant avec elles la même distance respectueuse que je garde envers mes patrons.
Eh bien, curieux phénomène, depuis que je suis adulte, à chaque fois que j’ai un travail dans lequel il y a 25% de femmes et plus, ce sont elles qui finissent par initier la sexualité entre nous. Ça va de la simple remarque osée à la proposition sexuelle, de la confidence intime à la déclaration d’amour, de l’exhibition coquine passive à l’agression violente empoigne-paquet dans un coin désert. Eh oui! Je ne sais pas si c’est un phénomène exclusivement québécois ou bien si ça se retrouve partout, mais laissez-moi vous dire que même si ça ne s’est jamais rendu jusqu’au viol proprement dit, je sais par expérience personnelle que les femmes sont capables du même harcèlement sexuel en milieu de travail que celui que l’on essaye de nous faire croire comme étant exclusivement masculin. Et si ça m’est arrivé aussi souvent, je ne dois tout de même pas être le seul.
Pour le moment, je vais fouiller dans ma mémoire et vous raconter la chose au meilleur de mes souvenirs et des feuilles lignées froissées et jaunies de mes archives. Bonne chose que depuis que j’ai 11 ans, j’écris presque tout ce qui m’arrive.
Le travail: Pâtissier dans un Dunkin Donuts.
L’époque: De 1990 à 1992
Mon âge: De mes 22 à 24 ans.
Manon est une mince et jolie petite brunette malgré un nez à la Gainsbourg. Dès les premiers jours, elle me parle et me décrit quelque peu sa vie, me disant qu’elle a un chum avec qui elle habite.
Une semaine plus tard, elle commence à me parler de sexe en me disant: « Mon chum a envie plus souvent que moi, mais moi chus pas tellement cochonne! »
Dans les jours qui suivent, elle me parle de plus en plus souvent de sexe.
Un mois plus tard, elle me fera des remarques sexuelles personnelles sur une base quotidienne.
Devant mon manque de réaction, elle finit par s’interroger. Elle me demande si je suis gai. Je lui répond que non, mais que puisqu’elle a déjà un chum, je considère que ses provocations ne sont que des blagues.
La semaine suivante, elle me raconte qu’elle vient de faire un ménage à trois bisexuel avec une copine et le copain de ce dernier, dans un motel, et elle me donne tellement de détails qu’elle n’en laisse aucun à mon imagination. Tellement que cette fois, elle réussit à m’allumer.
Étant célibataire et en manque, et voyant que son statut de couple ne semble pas l’empêcher de coucher avec qui elle veut, je me risque à lui dire que si elle est sérieuse, d’accord, je veux bien. Ou sinon, de cesser ses agaceries, parce que ça me déplait de me faire provoquer pour rien. Elle refuse mes deux propositions, et continuera à me harceler de remarques sexuelles. Un soir, elle va même jusqu’à lever la jupe de son uniforme devant moi en écartant les jambes, et elle me nargue en disant: « C’est ça qu’tu veux, hein? Ben tu l’auras seulement si MOI je le veux. Ha! Ha! » Son sexe est bien sûr caché par sa petite culotte et recouvert de ses collants blancs. N’empêche! Et j’ai eu à endurer ça jusqu’à sa démission quelques mois plus tard.
Kim: Cinq pieds deux, les yeux bleus et blonds cheveux, elle n’avait rien d’un top modèle avec son surplus de poids, ses dents croches et jaunies par des années de tabagisme, son menton fuyant et son nez dont la courbe évoque le bec d’un vautour. Elle est tout de même d’une nature joyeuse, ce qui en fait une compagne de travail agréable. Du moins, les premières semaines car un mois après ses débuts, une collègue de travail m’apprend que Kim a commencé à répandre la rumeur comme quoi je serais gai. Elle est arrivée à cette conclusion car je ne dis jamais rien à caractère sexuel à mes collègues de travail, ni directement ni en sous-entendus ni en blagues. Et puisque toutes mes collègues de travail sont des filles, ça lui semble louche que je n’en profite pas. J’avais pourtant de bonnes raisons de ne pas agir ainsi. D’abord, parce que ce n’est pas dans ma nature, et ensuite parce que je suis maintenant en couple avec une fille nommée Marie-France.
Un matin, Marie-France est venue me chercher à la fin de mon quart de travail. Kim, surprise que Marie-France existe pour vrai, nous propose d’aller déjeuner à un resto voisin. Nous acceptons. Au resto, Marie-France est à mes côtés tandis que Kim est assise face à moi. Nous jasons de choses et d’autres lorsque soudain, j’ai la surprise de sentir le pied de Kim qui, sorti de sa botte d’hiver, se glisse entre mes genoux. Je referme aussitôt mes jambes. Elle répond à mon geste en poussant plus fort avec son pied. Je sens soudain les deux pattes avant de ma chaise qui lèvent de terre. J’ai le réflexe de m’ouvrir les cuisses. Les pattes de chaise retombent par terre. Je vois le sourire triomphant de Kim. Bien calée sur sa banquette fixée au mur, elle ne pouvais pas basculer sous la poussée de sa jambe, elle. Mes cuisses lui laissant maintenant le passage, Kim envoie doucement son pied plus loin, jusqu’à pouvoir me caresser l’entrejambe. Surpris de son geste et complètement désemparé, je ne sais pas trop comment réagir. Cette situation me rend franchement mal à l’aise, surtout avec ma blonde assise à côté de moi. Je voudrais que Kim cesse, mais comment pourrais-je réagir? Si je ferme les cuisses, Kim va me faire tomber à la renverse, et comme je la connais, elle va sûrement nier y être pour quelque chose. Si je recule avec ma chaise pour me mettre hors de portée de Kim, Marie-France va me demander pourquoi je me distance de la table. Si je dénonce Kim, je créé un malaise, sans compter qu’elle va probablement tout nier. Je n’ai donc pas le choix. Tout le long du repas, il me faut endurer ses attouchements malvenus en faisant semblant de rien.
Sharon était une brunette anglophone quasi-obèse qui avait un chum. Ils habitaient tous les deux chez la mère de ce dernier. Elle était très visiblement attirée par moi, et plus le temps passait et moins les messages qu’elle me passait à ce sujet étaient subtils. Mais bon, puisque l’on était tous les deux en couple, je passais ça sous le compte de son sens de l’humour. Il est vrai que c’était une jeune femme très enjouée.
Dès qu’elle a appris ma rupture, elle me dit que, quel hasard, elle a elle-même rompu la veille. Bon, elle habitait encore avec lui chez la mère de ce dernier en attendant de se trouver un appartement, ce qui fait qu’il ne faudrait pas qu’elle soit vue publiquement avec un autre garçon pour ne pas créer de scandale. Mais sinon ouais, elle m’assure que tout est vraiment fini entre eux. Son histoire sent la bullshit à plein nez. Mais bon, pour ce que ça change. Ce n’est pas comme si elle m’attirait.
Trois jours plus tard, un soir où je travaille tandis que Sharon a congé, cette dernière entre dans la cuisine vers deux heure du matin. Apparemment, elle revient d’un des bars du quartier parce qu’elle a visiblement une bonne douzaine de verres dans le nez, en plus de s’être habillée sexy. Elle me fait des avances qui n’ont plus rien de subtil et essaye de me faire la prise du calmar en rut. Je l’évite et je fais de mon mieux pour ignorer ses avances, en lui disant que je n’ai pas vraiment le temps de lui parler parce que je vais être en retard dans ma production. Elle me suit dans l’entrepôt arrière alors que je m’en vais chercher une poche de cinquante livres de sucre à glacer pour préparer la crème pâtissière. Elle se met devant la porte et me bloque le chemin, me disant que si je veux en sortir, il va falloir lui passer sur le corps. Elle a un chum, elle ne m’attire pas, et elle est saoule. N’importe laquelle de ces raisons est suffisante pour que je refuse de faire quoi que ce soit avec elle, alors imaginez les trois ensemble. Comme je viens pour passer, elle pose sa main directement sur mon entrejambe et essaye de m’embrasser. Je la bouscule sans considérations en passant mon chemin, mon sac de cinquante livres de sucre à glacer sur l’épaule. Elle n’insiste pas. Je suppose que le lendemain elle a eu honte de son comportement parce que dans la journée elle est revenue afin de rendre son uniforme ainsi que sa démission.
Sylvie était une petite aux cheveux bruns frisés avec taches de rousseurs et une petite voix timide. Ce qu’elle me disait, par contre, ne contenaient aucun degré de timidité. J’avais souvent droit à des confidences sur ses préférences sexuelles, comme par exemple: « Pour moi, la journée idéale, c’est me faire baiser au matin avant le travail, puis au retour du travail avant souper, puis après souper, puis après le bain avant de dormir », ou bien « Me faire pénétrer, je trouve ça aussi délicieux en arrière qu’en avant. », ou bien des agaceries du style de « C’est dommage qu’on ne travaille pas seuls, on pourrait aller s’enfermer dans les toilettes pour une petite vite. » Bien sûr, si je répondais positivement à ses propositions, elle trouvait toujours un truc pour nous empêcher. Elle a été obligée d’arrêter au bout de quelques mois. Sa grossesse devenait trop évidente pour qu’elle puisse me cacher plus longtemps la vraie raison pourquoi ce n’était que du harcèlement vide: Elle avait un chum, avec qui elle habitait depuis deux ans.
Hélène, 21 ans, était une superbe métisse au teint cuivré et à cheveu de corbeau, ce qui est surprenant puisque les corbeaux n’ont que des plumes. Avec elle, c’était un peu différent. Dès le départ, elle m’a fait comprendre que je n’aurais aucune chance car elle n’en a que pour les hommes qui ont l’âge d’être son père. Ceci précisé, elle me parlait de cul sans cesse, se décrivait comme une nympho, me taquinait, m’agaçait, m’allumait. Bon, j’avoue que ça m’allumait moins lorsqu’elle me racontait que l’été précédent, alors qu’elle travaillait avec une équipe de rénovation, elle s’était tapée un collègue de 40 ans dans un appartement vide sur lequel ils travaillaient. Puisque j’avais 23 ans, j’étais dégoûté à l’idée d’un gars dans la quarantaine qui se fait une fille 20 ans plus jeune. (Je changerai d’idée en atteignant moi-même la quarantaine, étrangement.)
Ensuite, il y a eu Isabelle l’infidèle, dont j’ai déjà parlé dans ce billet. Elle aussi avait un chum, elle aussi habitait avec lui, et elle aussi ne cessait de me draguer.
Christine ressemblait à une jeune Brigitte Nielsen. Elle m’invite, après notre quart de travail nocturne, à aller déjeuner à un resto du quartier, car elle a quelque chose d’assez important à me dire. Je trouve ça un peu étrange car nous n’avons jamais été autre chose que camarades de travail, mais bon, j’accepte. Au resto, elle m’explique qu’elle est célibataire depuis trop longtemps à son goût, elle insiste comme quoi elle ne veut surtout pas de relation de couple stable, mais qu’elle a des manques du côté sexuel, et qu’elle n’est pas du genre à avoir des histoires d’un soir ni de coucher avec n’importe qui. Voilà pourquoi elle me propose une relation de simple collègues de travail devant tout le monde, mais en privé on serait amants. Je ne m’attendais certainement pas à ça.
Et tout ça durant les deux ans où j’ai travaillé à cet endroit. De la part de minces comme de grosses, de petites comme de grandes, de belles comme de laides, de célibataires comme en couple. Et ce n’est pas parce que j’étais exceptionnellement beau ou athlétique. Bien au contraire. Voici une photo de moi datant d’avril 1991, pendant cette période.
Remarquez que ce n’est pas non plus comme si toutes les femmes qui subissent le harcèlement sexuel ou même le viol étaient des top-modèles.
Ces sept filles représentaient, au meilleur de mes souvenirs, le tiers ou le quart de celles avec qui j’ai travaillé durant cette période. Et ceci n’était qu’à mon premier travail.
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