Geneviève, la coloc de l’enfer, 7e partie: Histoires de cul.

Le retour de Geneviève après les vacances du temps des fêtes et de la crise du verglas m’a replongé dans la routine habituelle des abus de toutes sortes de sa part.  Par exemple, des fois, au matin, je retrouvais mes cartons de jus ou de lait vide dans le frigo.  Des fois, en rentrant chez moi après le travail, je constatais que ma TV et mon lecteur vidéo VHS avaient disparus de ma chambre parce qu’elle les avait installés dans la sienne.  Des fois je me rendais compte qu’elle s’était servie dans mes cassettes vidéos personnelles et avait enregistré un de ses programmes par-dessus des films maison irremplaçables, ou de mes vieilles apparitions à la télé.

Un samedi, je suis dans ma chambre et travaille à ma table à dessin.  Comme je l’ai déjà dit plus tôt, ma chambre est en fait le salon. Par conséquent, je n’ai pas de porte.  J’ai mis un drap qui tient au mur au dessus de l’entrée du salon avec deux punaises. C’est peut-être assez pour me donner un minimum d’intimité, surtout que cette entrée donne direct sur la porte d’entrée de l’appartement, mais c’est loin d’être suffisant pour repousser les indésirables.

Geneviève  tasse le drap-porte, entre dans ma chambre, vient se mettre à côté de moi, et me lâche une flatulence bruyante à souhait. Elle éclate de rire, se trouvant  très drôle.  Au bout de quelques secondes, ses effluves anales viennent m’envahir les nasaux.  Je ne sais pas si elle avait mangé de la charogne farcie au chou pourri, mais ça puait en tabarnak. Elle repart, l’air toute fière de son coup.  J’attends patiemment que l’odeur se dissipe. Ce n’est pas comme si j’avais d’autres options.

Quelques minutes plus tard, elle revient, recommence et repart.

Quelques minutes plus tard, elle revient, recommence et repart.

Quelques minutes plus tard, elle revient, recommence et repart.

Quelques minutes plus tard, elle revient, recommence et repart.

Quelques minutes plus tard, elle revient, recommence et repart.

Répéter ad nauseam.

Une fois ça peut être une blague.  Deux ou même trois fois, ça peut encore passer si on est patient. Mais là, franchement, ça commençait à devenir gazant. J’avais beau lui dire qu’elle était immature et sans allure, elle me répliquait que c’est plutôt le fait de frustrer à cause que sa coloc a pété qui démontre de l’immaturité.  Et elle a continué à venir me larguer des caisses en attendant juste assez pour que sa puanteur imprègne bien ma chambre, avant de repartir.  L’odeur restait dans la pièce à cause du drap devant la porte.  Et puisqu’il faisait dans les environs de -12°C dehors, ouvrir une fenêtre n’était pas une option. J’ai eu à endurer ça pendant les trois heures qui ont suivi. Et elle, elle se trouvait toujours aussi drôle à chaque fois.

 Cette fille avait vraiment un don pour savoir comment utiliser la moindre petite chose insignifiante et la pousser à son paroxysme afin de me pousser à bout de nerf.  Elle savait très bien que si je réagissais, alors elle pouvait me faire passer pour un malade mental, de perdre patience pour quelque chose d’aussi anodin que le fait de péter. 

Éventuellement, elle a fini par manquer de gaz et j’ai enfin pu avoir la paix.  N’empêche que les gens qui  font de la provocation pure et simple dans ce genre-là, juste pour le plaisir d’écœurer les autres, ça me pue au nez. 

Une semaine ou deux plus tard, en lisant le journal Photo Police, je trouve une offre intéressante: Une cassette VHS contenant huit heures de films cochons pour 20$, frais de porc… euh, frais de port inclus. Étant encore à l’époque un jeune homme fringuant et pornophile, je n’ai pas pu résister.  Bien qu’Internet commence à apparaître dans plus en plus de foyers québécois, je ne l’avais pas encore chez moi, alors je n’avais pas accès à la tonne de porno gratuite que l’on pouvait déjà y trouver. Je remplis donc le bon de commande, le mets dans une enveloppe que j’adresse.  Je la laisse décachetée le temps d’y écrire et inclure le chèque.

Fidèle à son habitude, Geneviève entre dans ma chambre sans raisons. Son regard se pose sur le bordel recouvrant ma table à dessin où s’empilent pèle-mêle 8624 items divers.

Juste pour faire exprès, de toutes les choses qu’il y avait là, qu’elle a été la seule et unique qui y a attiré son attention, vous pensez?  Eh oui, c’est l’enveloppe.  Elle la prend. Je lui enlève des mains en lui disant que depuis qu’on habite ensemble, elle commence à me tomber sur les nerfs avec ses invasions dans ma chambre et ma vie privée. Elle me dit:

« Pogne pas les nerfs, bonhomme. Je voulais juste savoir c’était à qui que t’écrivais. »

 L’adresse dessus était à Montréal pour un monsieur B.Gervais, alors si ça pouvait la faire partir, je voulais bien lui montrer. Je lui tiens donc l’enveloppe devant la face.  Elle me l’arrache des mains et l’ouvre.   La dernière chose que je veux, c’est que cette fille se trouve une VRAIE raison de me niaiser, alors je n’ai vraiment pas intérêt à ce qu’elle sache que je commande des films pornos. Je lui saute dessus et lui enlève sauvagement l’enveloppe des mains en criant : « Heille, ça va faire ! » 

En bien croyez-le ou non, elle a passé les douze minutes suivantes à essayer de me l’enlever, me bousculant, me frappant, m’agrippant… Elle n’arrêtait pas. C’est long douze minutes dans ce temps là. J’avais beau me dire que ce n’était plus qu’une questions de secondes, voire de quelques minutes avant qu’elle s’écœure et arrête… Rien à faire, elle n’arrêtait pas. Impossible d’avoir la paix.

J’avais le goût de la frapper tellement j’en avais plein le cul de son insistance de morpion à parcourir mon intimité. Mais peu importe la raison, aux yeux de la loi, un homme n’a pas à frapper une femme. Alors imaginez en plus si la seule chose que j’ai à donner au juge pour expliquer mon geste est « Elle voulait m’enlever mon enveloppe, m’sieur! » J’aurais eu l’air de quoi ? Vraiment, comme je le disais plus tôt, elle avait le don de prendre le moindre comportement enfantin et le pousser à l’extrême limite du supportable.

J’ai quand même réussi à la repousser assez pour avoir le temps de courir jusqu’aux toilettes où je me suis enfermé. Tandis que je reprenais mon souffle, je n’en revenais pas de devoir endurer des imbécillités pareilles à mon âge. Come on là, j’allais avoir trente ans cet été, ça n’avait pas d’allure de se retrouver dans des situations aussi ridicules.

 Mais voilà, son insistance ne s’est pas arrêtée là. Elle a essayé de débarrer la porte en entrant un cure-dent dans le trou de sécurité au milieu de la poignée.  Je n’avais jamais été vraiment athlétique mais j’ai au moins la chance d’avoir une forte poigne. Aussi, elle n’a pas réussi à faire tourner la poignée que je tenais bien solidement.  

Et c’est là que le côté aberrant de son comportement a atteint son point culminant.  La porte de la salle de bain fait face à un mur, le mur du corridor. Aussi, Geneviève s’est assise par terre, accotant son dos à la porte. Puis, appuyant ses pieds sur le mur d’en face, elle a commencé à pousser de toute la force de ses jambes.  Je sentais la porte plier.   J’ai entendu la porte craquer.   J’ai senti le métal de la poignée de porte changer de forme dans ma main.   J’ai vu le bois du bas de la porte fendiller, des lamelles se former et se redresser dans un craquement sinistre. J’en restais bouche bée.

« Non ! C’est pas possible. Je ne peux pas croire qu’une fille de vingt et un ans puisse en arriver à de telles extrêmes…  Être prête à vandaliser son propre appartement en défonçant la porte des toilettes, juste pour pouvoir lire du courrier qui ne la concerne pas. »

 Le bol de toilette n’étant pas loin de la porte, je n’avais plus qu’une seule option pour faire cesser tout ce cirque. Tenant la poignée de porte d’une main, j’ai utilisé ma main libre et mes dents pour déchirer l’enveloppe et son contenu, avant d’en jeter les morceaux dans la cuvette, et de flusher le tout. Elle a donc cessé de pousser sur la porte, et j’ai enfin pu l’ouvrir. Comme il fallait s’y attendre, j’ai eu droit à ses commentaires rabaissant:

« Ayoye! Préférer déchirer pis flusher la lettre plutôt que de me laisser la voir. Hostie que t’es bébé, man. C’est vraiment pas la maturité qui t’étouffe. »
« Me faire sermonner sur la maturité par quelqu’un qui a passé vingt minutes à essayer de voir du courrier qui ne la concerne pas.  Tu peux ben parler! »
« T’es malade, man! »
« Moi, chus un malade? »
« Pour préférer déchirer pis flusher une lettre plutôt que de laisser une autre personne la voir, faut être malade mental en tabarnak. »
« S’cuse, mais
aux dernières nouvelles, c’est pas moi qu’on a été obligé d’enfermer pendant trois mois à Douglas. »

Mes paroles lui font l’effet d’une gifle. Elle ouvre la bouche en écarquillant les yeux.  Après deux où trois secondes dans lesquelles elle n’a pas l’air de croire que je viens de lui dire ça, elle se met à gueuler.

« Hostie de chien! Hostie de calice de tabarnak de chien sale!  T’as pas d’affaire à me dire des écoeuranteries de c’te genre-là.  Tu t’penses ben bon, hein, d’attaquer une fille sur ses points faibles?  Hein?  Tu penses-tu que chus fière d’avoir perdu l’été de mes dix-huit ans, enfermée dans un hôpital psychiatrique parce que j’étais trop décrissée moralement pour être même capable de manger?  J’AI FAITE UNE DÉPRESSION, CALICE!  C’est drôle, hein? C’est drôle de niaiser une fille sur la période où elle n’a jamais été aussi bas de toute sa vie? Ça t’aides-tu à te sentir supérieur, de varger sur une fille pendant qu’elle est à terre? »

Elle éclate en sanglots.

« TIENS, T’ES CONTENT, LÀ?  TU M’FAIS BRAILLER, TABARNAK! »

Sur ce, elle tourne les talons et entre dans sa chambre, fermant la porte dans un vacarme, et se met à pousser des hurlements qui ne sont entrecoupés que par des sanglots qu’elle pousse avec force.  Je n’arrive pas à croire la scène surréaliste qu’elle vient de me jouer.  Pour être certain que j’ai bien saisi la situation, je me la résume à voix basse.

« Elle vient dans ma chambre, me chercher querelle, et elle réagit comme si c’était moi l’agresseur.  Elle m’a attaqué physiquement, je me suis défendu verbalement, et elle agit comme si je l’avais frappée.  Elle me traite de malade mental alors que c’est elle qui a été suivie en psychiatrie.  Elle ne se gêne pas pour me lancer un nombre incalculable d’insultes et des fausses accusations, mais quand je lui dit une seule vérité objective, ça fait de moi un écoeurant de chien sale.  Où bien j’accepte ses abus et elle me traite en loser, ou bien je ne les accepte pas et elle me traite en agresseur.  Elle vient toujours me chercher pour déclancher la confrontation, et quoi que je fasse, elle s’arrange pour me donner le mauvais rôle. »

Ras le bol de cette situation sans issue.  Cette fois, j’ai atteint ma limite.  C’est décidé: Dans deux semaines, soit le 1er mars, je pars d’ici.  Si je ne trouve pas d’appartement, alors tant pis, j’irai vivre chez mon ex et nos enfants. S’il le faut, j’irai retourner vivre chez mes parents à St-Hyacinthe, quitte à faire deux heures de route pour aller travailler et deux autres pour revenir.  Mais calvaire, faut que je décrisse d’icite!

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8 réflexions au sujet de « Geneviève, la coloc de l’enfer, 7e partie: Histoires de cul. »

  1. Ping : Quelques exemples flagrants de conflictuodépendance (en 9 étapes) | Mes Prétentions de Sagesse

  2. C’est un palisir de relire les aventures de cette fameuse Geneviève. Je croyais que tu ne le remettrais jamais en ligne. Toujours le fun de lire tes textes. D’un grand fan depuis plus de 10 ans.
    Alexandre

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    • Merci. Au nombre de fois où on me l’a demandé, je me suis senti un peu coupable de ne pas l’avoir fait avant. Pour la peine, j’ai rajouté une intro expliquant comment je l’ai rencontré + ma relation pré-appartement avec elle, ce qu’il n’y avait pas dans la version originale. Et j’ai terminé en rajoutant la rencontre-de-dix-ans-plus-tard, chose que je ne pouvais pas faire lorsque je l’ai écrit en 2003 puisque la rencontre a eu lieu en 2007.

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  3. Ping : Le potentiel de violence domestique des conflictuodépendants | Mes Prétentions de Sagesse

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