À notre époque, les gens voient des Red Flags partout. En fait, c’est rendu tellement normal d’avoir des Red Flags que le fait de ne pas en avoir est considéré comme étant louche, ce qui soulève un Red Flag. C’est que puisque personne n’est parfait, chacun de nous va forcément évoquer des Red Flags aux yeux de quelqu’un. Voilà pourquoi on a appris à les tolérer. Parce que si on se coupait de tous ceux en qui on voit des Red Flags, on ne fréquenterait plus jamais personne.
Ariane est devenue ma collègue en juin dernier. 48 ans, belle grande femme, en forme, énergique, elle travaillait toujours avec sourire et enthousiasme.

Peu après son arrivée, elle a commencé à se plaindre comme quoi elle était la cible de harcèlement constant de la part de notre collègue Kevin. Ariane m’a montré des textos qu’il lui envoyait. Le gars ne faisait pas dans la subtilité. Déclarations d’amour, propositions sexuelles… Et, voyant qu’elle ne lui répondait plus, il lui a même écrit : « Réponds-moi sinon je t’embrasse passionnément au poste des infirmières devant tout le monde lol. » Elle a fini par porter plainte à la direction, textos comme preuves, et il a été immédiatement congédié.
J’ai déjà parlé ici, il y a quelques années, de l’importance de la première impression que l’on fait sur les autres. Par exemple, lorsqu’un conjoint devient abusif, sa femme va continuer de s’accrocher à l’image de l’homme bon, respectueux et romantique qu’il était au début. C’est comme ça qu’elle l’a connu, alors c’est comme ça qu’est « le vrai lui » à ses yeux. Ainsi, à cause du harcèlement qu’Ariane a subi dès son entrée en poste, elle a obtenu dès le départ une image de victime pure et innocente, s’attirant la sympathie et la solidarité de tous.
Et voilà pourquoi je serai porté à fermer les yeux devant les Red Flags que soulèveront les comportements d’Ariane dans les semaines qui allaient venir.
1er RED FLAG : La vérité au sujet de sa relation avec Kevin.
Elle a fini par m’avouer certains trucs qui remettent les choses en perspective. Quelques semaines plus tôt, le 24 juin, jour de la Saint-Jean-Baptiste, elle était allé sur la plage pour voir les feux d’artifices. Elle y a croisé Kevin par hasard. Ils ont passé la soirée sur la plage, ensemble, à boire et s’amuser. Puis, il l’a reconduit chez elle. Et là, au moment où elle allait entrer, elle cède à une impulsion. Elle l’agrippe, l’embrasse, lui dit bonne nuit, entre chez elle et ferme la porte.
Le reste de leur courte relation diverge selon qui me la racontait. Mais une chose concorde, et c’est qu’elle avait un comportement envers lui qui changeait sans cesse, passant d’amicale à froide et inversement. Disons que je comprennais un peu mieux pourquoi il lui envoyait des textos comme s’ils étaient en couple. Le gars ne savait plus sur quel pied danser.
Tout Red Flag que c’était, je me disais que, bof, la personnalité de cette fille ne m’attire pas. Alors si elle tente ce genre de repprochement avec moi, je lui ferai comprendre immédiatement que non, désolé, je ne le sens pas. Donc, pas de risque pour moi.
2e RED FLAG : Les conflits de plus en plus nombreux avec les collègues.
Un jour, alors qu’il y avait une section isolée pour cause de covid, il fallait bien évidemment porter l’uniforme de sécurité, incluant gants, masque et visière. Lors d’une conversation sur Messenger avec notre collègue Francine, cette dernière avait écrit à Ariane qu’elle détestait porter le masque et qu’il n’était pas question qu’elle le mette. Elle ajouta même que, devant les patrons, elle le mettra. Mais dès qu’elle sera dans la section isolée, là où les patrons ne vont pas, elle le retirera.
Ariane considérait que l’attitude de Francine représentait un danger de contamination pour les résidents sains. À juste titre, je dois dire. Elle a donc envoyé des captures d’écran de cette conversation aux patrons. Et ceux-ci ont tôt fait de renvoyer Francine.
Mais bientôt, pour diverses raisons, elle déposait des plaintes au sujet d’un autre collègue. Et d’un autre. Et d’un autre. Rendu à sa sixième plainte en deux mois, c’en était rendu un peu n’importe quoi: Une collègue avait demandé congé pour deuil. Il se trouve que la collègue était sa voisine d’en face, leurs deux portes étant opposées. Ariane ayant entendu la collègue rire et recevoir des amis, elle l’a dénoncé au directeur, comme quoi elle n’avait vraiment pas l’attitude d’une personne en deuil. Donc qu’elle avait demandé congé pour des raisons bidon.
À partir de ce point, le directeur lui a carrément dit que là, puisque ça sortait du cadre du lieu de travail, c’était une atteinte à la vie privée. Et qu’à partir de maintenant, il ne voulait plus l’entendre se plaindre de qui que ce soit. Il est vrai que si on l’écoutait, il faudrait mettre tout le monde dehors, alors que nous sommes déjà en manque de personnel
De plus, elle me parlait souvent des conflits qu’elle avait eu avec les différents propriétaires des logis successifs qu’elle a occupé. Dont le proprio actuel et les deux précédents, et ce simultanément. Elle leur adressait des plaintes, des menaces d’appels à la police, ils ont eu droit à des mises en demeure et à des poursuites à la Régie du Logement, et aux tribunaux légaux, au civil et au criminel.
Tout Red Flag que c’était, je me disais que, bof, personnellement, je ne risquais rien. Je n’avais aucun comportement répréhensible, ni dans mon travail, ni envers elle. Elle n’avait donc aucune raison de me causer des problèmes avec mon travail et/ou avec la loi.
Puisqu’elle habitait sur mon chemin, que nos horaires correspondaient et qu’elle n’avait pas de véhicule, elle a commencé à me demander de passer la prendre. Ce que j’ai accepté. Et c’est comme ça qu’on a commencé peu à peu à se voir en dehors des heures de boulot.
Au travail, notre complicité était évidente. Ce qui fait que la moitié de nos collègues croyaient que nous formions un couple. Et l’autre moitié, qui savaient que ce n’était pas le cas, trouvaient néanmoins que l’on irait bien ensemble. Je n’étais pas de cet avis. Premièrement, tel que je l’explique dans ce billet, pour douze raisons, je suis radicalement opposé aux relations amoureuses et/ou sexuelles avec une collègue de travail. Surtout qu’à partir du moment où tu es en couple, l’autre se croit en droit de t’imposer des exigences de toutes sortes. Je connais assez Ariane pour savoir qu’elle est facile à contrarier. Être avec elle deviendrait pénible assez vite.
3e RED FLAG : Son alcoolisme.
Un jour, elle me demande s’il y a de bons restos et bars dans le coin. Il y en a près de chez moi. Puisqu’elle n’a pas de transport et moi oui, c’est ainsi qu’on a commencé à faire des sorties ensemble. Elle ne buvait jamais de bière, mais se rattrapait amplement dans les cocktails. Elle en buvait d’ailleurs beaucoup lors de ces sorties.
Au fil des semaines, je constate que lors de nos pauses de diner au travail, elle boit du vin rouge, du rosé, du mousseux. Un matin alors que je vais la chercher avant le travail, je la réveille. Elle se lève, va à la cuisine, ouvre le frigo, prend une bouteille de vodka, en boit deux ou trois gorgées. Puis, elle remet la bouteille au frigo et se prépare un café.
Tout Red Flag que c’était, je me disais que, bof, qu’est-ce que ça donnerait que je lui en parle? Elle a 48 ans. Elle doit bien le savoir, qu’elle est alcoolique. Tout commentaire de ma part à ce sujet serait considéré comme étant jugemental.
Un soir, au travail, alors que nous mangions à une table à l’extérieur, elle a bu la moitié d’un carton d’un litre de vin pendant son repas, et elle a vidé le reste dans sa gourde pour pouvoir continuer de boire pendant le reste de son quart de travail. Le lendemain, elle était congédiée.
4e RED FLAG : Son côté revanchard, impulsif et irréfléchi.
Dès qu’elle a appris qu’elle était renvoyée pour consommation d’alcool sur les lieux de travail, j’ai été le premier qu’elle a soupçonné de l’avoir dénoncé. Par écrit et par message vocaux, j’ai eu droit à ses menaces, comme quoi elle avait contacté plusieurs de nos anciens collègues de travail, afin de déposer des plaintes contre moi à la direction, également pour consommation d’alcool au travail. Qu’importe que ce soit faux, l’important était que je ne me tire pas impunément de cette trahison.
Tout Red Flag que c’était, je me disais que, bof, il est vrai que de son point de vue, j’étais effectivement la seule personne qui savait qu’elle buvait au travail. Il était donc normal que je sois le premier suspect de cette délation. Et qu’avec sa promptitude explosive à réagir face aux comportements négatifs des autres, il fallait que je m’attende à ses plans de vengeance.
Le lendemain, elle m’appelle en larmes et implore mon pardon. Elle a appris qu’en fait, c’était un collègue dans une auto, dans le parking, qui l’avait vu faire, et qui l’a dénoncé à la direction. On a donc pu faire la paix. Puisqu’en perdant son emploi elle perdait automatiquement son logis, elle a eu à retourner à Laval. Je l’ai amené prendre le bus à Rimouski, à trois de route heures d’ici, ce qui a grandement diminué son temps de voyagement. Elle n’a pas pu emporter son encombrant équipement de gym. Je l’ai laissé dans mon auto, en lui promettant que je le lui apporterais lors de ma prochaine semaine de congé dans trois semaines.
On a continué de se texter à tous les jours. Et c’est là, à l’avant-veille de mon départ, que j’ai eu mon…
5e RED FLAG : Son passé criminel.
Déjà qu’il est difficile de se retrouver un emploi si on s’est fait renvoyer pour consommation d’alcool au travail, voilà qu’elle se plaint que les enquêtes des employeurs où elle a soumis sa candidature ont révélés la présence de plumitifs à son nom. Les plumitifs, ce sont les registres publics informatisés qui contiennent l’historique des dossiers judiciaires des gens et des entreprises au Québec. Elle en aurait trois en tout. Un datant de 1995, dont elle ne se souvient plus la raison. Un de 2005, pour violence conjugale. Et le dernier, pour harcèlement, pas plus tard qu’il y a trois ans, en 2021.
Elle m’explique l’accusation de 2005. Alors qu’elle était enceinte, le (futur) père de sa fille aurait appelé la police afin de la faire sortir du logis commun, après qu’elle l’aurait menacé de l’agresser avec un pic à glace pendant son sommeil. C’est ainsi qu’elle a passé quelques temps à Tanguay, la prison pour femmes.
Bien sûr, elle nie tout. Elle affirme que, suite à une violente dispute, il voulait la jeter dehors. Puisqu’elle refusait de partir, il aurait appelé la police et l’a fait sortir en portant de fausses allégations contre elle.
Je dois avouer que je ne suis pas prêt à 100% à croire qu’il mentait. Lorsque je repense aux menaces qu’elle m’a écrit alors qu’elle croyait à tort que j’avais dénoncé son alcoolisme au travail, je l’imagine aisément être capable de dire n’importe quoi dans le cadre d’une violente dispute de couple.
Tout Red Flag que c’était, je me disais que, bof, je ne suis pas en couple avec elle et je ne le serai jamais. Elle n’a donc aucune raison d’avoir la moindre exigence à mon égard. Cela me met à l’abri de ses menaces de voies de fait.
Et c’est là qu’elle me sert le…
6e RED FLAG : Ses propres allégations mensongères.
Elle me dit que dans le fond, avoir été la cible de plaintes mensongères à la police, c’était un simple retour de karma. Car c’est quelque chose qu’elle faisait déjà elle-même lorsqu’elle avait 18 ans, alors qu’elle était en appartement avec son conjoint de l’époque. Un soir où elle s’était disputée avec lui, elle l’a fait arrêter en mentant aux policiers, en l’accusant de violence conjugale. Le pauvre gars a passé la nuit au poste de police. Mais elle me conclut son anecdote en me disant que le lendemain, elle retirait sa plainte, donc que tout était OK.
Le problème, c’est que non, je sais très bien qu’avec ce genre d’accusations, tout n’est pas OK. Lorsque la femme retire sa plainte, la loi applique une mesure préventive, au cas où elle ne la retirerait que par peur des représailles de la part de l’homme. L’homme se voit donc être mis sous probation pendant deux ans. Deux ans pendant lesquels il lui est interdit d’avoir le moindre démêlé avec la Justice, sinon c’est la prison directe. Ce qui signifie qu’elle l’a mis en position pour pouvoir abuser de lui à loisir pendant deux ans, à obéir à ses moindres caprices, sinon elle avait le pouvoir de ruiner sa vie, en faisant de lui un criminel. Et après la fin de la probation, c’est trois ans d’attente avant d’avoir le droit de demander un pardon judiciaire qui effacerait son dossier. Et c’est un procédé qui prend aisément un an, sinon deux. Ce qui signifie de six à sept ans à avoir un dossier judiciaire. J’espère qu’il avait déjà un emploi. Parce qu’il est difficile de touver un employeur qui ne fera pas d’enquête avant l’embauche. Comme le constate actuellement Ariane avec son plumitif, puisqu’elle ne s’est jamais donné la peine de faire effacer son propre dossier.
À ce Red Flag-là, par contre, je n’ai pas dit bof ! Ses méthodes d’attaques en situation de conflit me rappellent inconfortablement ce que je subissais moi-même de la part de la mère de mes enfants. J’ai toujours trouvé étrange que les femmes victimes de violence conjugale ou d’agressions sexuelles affirment ça ne sert à rien de porter plainte car la loi ne fait rien contre les hommes. Par contre, chaque fois qu’une femme dépose une plainte mensongère à la police contre un homme, ce dernier se retrouve avec des problèmes judiciaires et sociaux pendant de nombreuses années. Il y a quelque chose qui m’échappe dans tout ça.
Mais bon, là encore, puisque je ne serai jamais son conjoint, son amoureux, son amant, ni même son colocataire, et que jamais je n’ai mal agi envers elle, je suis à l’abri de son attitude revancharde. Je suppose que je peux me permettre de fermer les yeux encore une fois sur son comportement.
Pour ma semaine de congé qui approche, Ariane m’invite chez elle, m’offrant l’hébergement pour toute sa durée. Je vais accepter pour le premier soir, puisqu’il est prévu que je passe une partie de mon séjour chez Flavie. (Une ex avec qui j’ai toujours été en bons termes, et avec qui on se partage parfois la garde de nos deux chats.) L’une des raisons pour laquelle je reviens dans la région, c’est que nous voilà au temps de la révision annuelle de mon véhicule, ainsi que la pose des pneus d’hiver. Mes pneus sont dans mon entrepôt à Beloeil, ville située peu avant Montréal. Mais je ne peux pas les embarquer puisque mon auto est encombrée avec les machines de gym d’Ariane. Je dois d’abord aller déposer ces dernières chez elle samedi. J’irai récupérer mes pneus à Beloeil dimanche. Et j’irai à mon rendez-vous au concessionnaire lundi.
Alors que je parcours les 800 km qui nous séparent, je ne me doute nullement que dans 24h, tout va s’écrouler entre nous.
À CONCLURE. Suite et fin juste ici.
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