JUILLET 2012
Je ne sais pas si c’est le fait que je manipule une lourde pompe à diésel de 20 à 30 fois par jour depuis un an, mais je commence à avoir mal aux coudes à chaque fois que je le fais. Peu importe, j’ai pris les deux dernières semaines du mois pour mes vacances, je pourrai me les reposer à ce moment-là. Le truc étrange, c’est que tout le monde, autant mes boss que mes collègues, sont surpris que je prends mes deux semaines collées. Tant pis si ça leur cause des problèmes d’horaire, avec tout le temps supplémentaire que j’ai fait en un an, je mérite bien mon repos.
Quoi que repos c’est vite dit. Je passerai la première semaine de vacances avec mes parents, et eux sont loin d’être reposants. Surtout mon père qui est un enragé verbal au volant. Alors pour ce qui est du trajet Montréal-Québec…
C’est à cette occasion que je reverrai mon fils ainé pour la première fois depuis quatre ans. C’est maintenant un homme et un fier papa. Je demande à ma belle-fille de nous prendre en photo tous les quatre…
… histoire de poursuivre la tradition familiale de prendre 4 générations sur la même photo.
Le 21 juillet, j’ai 44 ans. Je passe cette journée exactement comme je le planifiais : Étendu confortablement sur mon divan, devant la télé, canettes de Diet Pepsi glacé à la main, bien au frais dans mon appartement au sous-sol, une brise fraîche qui entre par la fenêtre, mon chat ronronnant couché sur mon ventre. Calme, relaxation, détente, bonheur. C’est fou comment ma conception de l’anniversaire idéal a pu changer en 25 ans. Si j’avais passé le jour de mon 19e anniversaire de cette façon, je me serais trouvé loser en #@/$?&!!
À temps perdu, j’écris ce qui deviendra mon texte le plus populaire de tous les temps: Quelques comportements qu’il faudrait cesser d’avoir sur Facebook. Plus de 62 000 visites en une semaine, dont 21 860 pour le 2e jour. Ça fait changement de mes habituels 50-à-120 visites quotidiennes. J’ai apparemment mis le doigt sur un sujet d’intérêt public, car une dizaine de stations de radios en ont parlé en ondes, sur leur page Facebook et leurs Twitter. Jusqu’à l’émission Salut Bonjour qui en a fait une capsule à la télé au matin du 3e jour.
AOUT 2012
De retour au travail. Je suis déçu de constater que mes coudes ne vont pas mieux du tout. Je décide qu’il est temps de changer de métier. Je me dirige au bureau de mon grand boss pour lui dire que je suis prêt à passer mon test pour mon permis de classe 2 à la SAAQ. Une surprise m’attend: On m’apprend qu’il ne travaille plus ici. Eh non! Il se trouve que les dirigeants de la compagnie, situés à Toronto, ont envoyé des cravates (représentants unilingues anglais) ici afin de faire le ménage. Lundi dernier, quand mon boss s’est présenté au bureau, toutes ses affaires l’attendaient dehors, et on l’a sommé de rendre ses clés et ses cartes. Il était renvoyé. Son crime: Être trop relax avec les employés, trop généreux, pas assez à-cheval sur le règlement. Ainsi, son offre de me prêter un autobus pour mon test sur la route n’a plus aucun pouvoir maintenant qu’il n’est plus là, pas plus que celle de faire payer mon test par la compagnie puisque je serais à leur emploi. Maintenant, si je veux être chauffeur, c’est $3000.00. Je vis tout juste au niveau de mes moyens avec mes revenus actuels. Comment est-ce que je vais pouvoir économiser cet argent-là?
Fiston décide lui-aussi de prendre des vacances. Il viendra une semaine à Montréal, semaine où il logera chez moi. Il (re)visitera plein d’endroits où il a passé son enfance. Il le fera avec moi quand je suis libre, ou bien seul à vélo quand je travaille. Quoi que, quand j’arrive chez moi peu avant minuit après le boulot, on ne va pas se coucher pour autant: Pizzas, pogos, visite au McDo pour sundaes et McFlurries, etc.
Un coin en particulier que l’on visite se transforme bien malgré nous en aventure d’exploration urbaine: Alors que le soir tombe, je l’amène à La Petite Ferme du Parc Angrignon, où sa mère et moi l’amenions parfois lorsqu’il était petit. Les portes du côté sont grandes ouvertes, il n’y a aucun gardien, rien. Nous entrons, sans savoir que la place est à l’abandon depuis quelques années. Y’a pas à dire, il n’y a rien de plus creepy qu’un parc pour enfant non-entretenu et laissé à l’usure du temps. Nous en faisons le tour, nous prenons quelques photos et repartons. C’est lorsque nous revenons le lendemain pour visiter la place en plein jour que l’on se fait dire par les gardiens de la place que le parc est fermé au public. Ça a l’air que notre présence ici hier était illégale. Mais bon, c’était une erreur honnête. Ce n’est pas comme si on était entrés par effraction, ni comme si on s’était cachés non plus. Fiston retourne à Québec, bien heureux de sa visite.
Quant à moi, au travail, je me fais convoquer au bureau d’une des cravates. Il me dit qu’il a étudié mon dossier, et il a vu que depuis que je travaille là, j’ai fais pas moins de 6 accrochages en conduisant des bus. Or, la politique de la compagnie, c’est un renvoi après 3. Il consentent cependant à me garder puisque mon chef d’équipe lui a fait bien comprendre qu’ils sont toujours en manque de personnel au garage (Y’a une raison pourquoi j’ai fait autant de temps supplémentaire en un an). Cependant ils me collent un 3 jours de suspension sans solde, en m’avertissant bien qu’au prochain incident/accident, ce sera le renvoi immédiat.
Trois jours plus tard, de retour au travail, j’ai des doutes quant à mon avenir dans cet endroit. S’ils m’ont suspendus 3 jours pour des accidents mineurs, je doute qu’ils voudront me donner un poste de chauffeur. Finalement, alors que je pose des questions à un chauffeur au sujet de comment en devenir un, il me dit que selon la politique de la compagnie, on ne peut pas le devenir si on est myope à un degré plus que -5.00. … Je fais -9.25 d’un oeil et -10.00 de l’autre. Donc en résumé:
- Je n’ai pas le 3000$ pour me payer les cours.
- Les boss ne vont certainement pas m’engager même si je deviens chauffeur.
- Je suis trop myope pour le devenir anyway.
- Je risque de perdre ma job actuelle à tout moment, au moindre accrochage.
- Même si je n’accroche plus rien, mes coudes me font de plus en plus souffrir à manipuler la pompe à diesel.
Voyant que je n’ai plus aucun avenir dans cette compagnie, j’en viens à la conclusion que j’y ai fait mon temps. J’ai eu bien assez de me faire estropier les pieds, ça ne me tente pas de faire pareil avec mes bras.
Le 30 aout, je remet ma démission à mon chef d’équipe. Ma décision est sans appel. L’administration est surprise de me voir arriver avec ma lettre de démission, en rendant mes clés, ma carte, mes uniformes, prêt à remplir les documents de démission. Il parait que je suis le tout premier employé d’entretien du garage à le faire en bonne et due forme depuis l’ouverture de cette succursale, tous les autres ayant démissionné en sauvage en cessant tout simplement de rentrer travailler.
Oui, je pars comme ça, sur un coup de tête, sans avoir une autre job en vue et sans la moindre intention de demander chômage ou BS. D’abord, j’ai placé assez d’argent dans les Obligations d’Épargne du Canada pour pouvoir vivre là-dessus jusqu’à la fin de l’année s’il le faut. Ensuite, j’ai confiance que j’arriverai à me trouver autre chose en 3 semaines gros max. Il n’y a aucun doute dans ma tête là-dessus.
À continuer