On se lève le matin et tout porte à penser qu’il s’agit d’une journée comme les autres. Puis, arrive une série de petits malheurs. Il n’y a pas d’eau chaude pour la douche. Le lait a caillé. L’ordinateur cesse de fonctionner. L’auto a un problème de moteur et/ou une crevaison. Et tout ça arrive dans le pire des moments. Et on est là, découragé, à se demander pourquoi la vie est aussi injuste avec nous.
Sauf que dans les faits, c’est le contraire. Ce sont nous, les êtres humains, qui sommes injustes avec la vie, et ce depuis que la civilisation existe.
Voyez comment les choses fonctionnent depuis que le monde et l’humanité existe. Dès la naissance, la mort guette déjà bébé qui n’a absolument aucune capacité à survivre par lui-même. Il devait compter sur ses néandertaliens de parents pour réussir à vivre assez vieux pour procréer, et la nature ne faisait rien pour leur venir en aide : Épidémies, températures qui ne sont toujours pas clémentes, nourriture rare et difficile à se procurer, végétaux empoisonnés, prédateurs, etc. Pas étonnant que l’on mourrait de vieillesse entre 20 et 30 ans dans ce temps-là.
L’humain a réussi, peu à peu, à prendre des éléments de la nature et à les transformer de façons dont la nature n’a jamais permis. Ça a commencé par les maisons, les vêtements, l’agriculture, l’élevage. Les siècles ont passé, la science a progressé, et nous avons continué de transformer le monde. Nous l’avons fait de façon à s’offrir d’abord des conditions de survie, puis de vie, puis de luxe. Nous avons aujourd’hui les maisons, l’électricité, l’automobile et mille autre choses qui font partie de notre quotidien, et ce depuis notre naissance.
Et c’est justement le fait que nous avons ceci depuis notre naissance qui fait que pour beaucoup, la vie, le naturel, c’est ça : Un univers dans lequel tout fonctionne à merveille. Un univers où les autos roulent sans problème, ou l’électricité ne manque jamais, où on n’a jamais faim, jamais froid, où on ne s’ennuie jamais. Et à cause de ça, on a de la difficulté à comprendre qu’il est contre-nature que toutes ces choses non-naturelles fonctionnent. La nature, c’est le métal qui rouille. C’est caoutchouc qui s’assèche et s’effrite. Ce sont les composantes d’une pile qui corrodent. Le bois qui moisit. La terre qui bouge et fait craquer l’asphalte et les fondations de maison.
Et il ne s’agit pas que des choses matérielles. L’humain est un animal. Les animaux ont l’instinct de se battre, de tuer. Alors, pour aller contre notre nature, nous avons créé des lois pour empêcher ça. Et pour beaucoup d’hommes et de femmes, être monogame n’est pas dans leur nature. Nous avons donc crée des règles de société qui nous obligent moralement à la fidélité. Mais là encore, parfois, nous devenons victime lorsqu’une personne près de notre entourage tombe en panne morale. Une amitié se brise. Un couple cesse de fonctionner.
À chaque fois que quelque chose brise, tombe en panne, cesse de fonctionner, ce n’est pas la vie qui est injuste envers nous. C’est nous qui avons, pour un instant, cessé d’être injuste envers la vie. Une vie qui ne fait rien d’autre que suivre son cours et qui, en défaisant ce que nous avons fait contre son gré, ne fait que reprendre ses droits.
Ceci n’est pas une vision pessimiste de la vie. C’est tout simplement quelque chose à se souvenir à chaque fois que l’on ressent de la frustration lorsque quelque chose qui aurait dû fonctionner ne fonctionne pas. Parce que dans les faits, justement, ça n’aurait jamais dû fonctionner pour commencer.
Alors au lieu de frustrer contre quelque qui ne fonctionne plus, il faudrait au contraire être reconnaissant que ça ait fonctionné le temps que ça l’a fait.